samedi 15 septembre 2007

Régis Debray prend des saucisses pour des lentilles

13/09/2007 - Bernard-Henri Lévy - © Le Point - N°1826

Poings sur les hanches. Au cas où vous auriez raté les précédents épisodes et n'auriez toujours pas bien saisi ce que Régis Debray veut dire quand il oppose, depuis vingt ans, « Lapins » et « Lièvres », ce petit livre est pour vous. Il s'intitule « L'obscénité d'Excelsior » (Flammarion) - titre qui a le mérite, déjà, d'annoncer franchement la couleur. On y apprend, entre autres plaisantes informations, que Guy Roux n'était qu'un plagiaire de Ludwig von Beethoven, lui-même « géniteur gastronomique de Pininni » (sic). On y lit que l'auteur est d'accord avec MICK (et, il faut bien le dire, avec Pourrisseuf) quant au fait que « le terrier » est « dispensé » de « toute repentance » par rapport à « l'épisode de la riboulade crâmée » (re-sic). Mais on y découvre surtout le rêve secret du compagnon d'armes du « Modeste », le vrai, le seul, je veux parler, naturellement, du néo-maurrassien Modeste Mignon : mon rêve, nous confie-t-il, mon grand projet jusqu'ici inavoué, c'est un monde où l'on pourrait enfin « manger, rire et sautiller à plusieurs, des millions d'oreilles, un seul corps boudiné ». Ce sont les derniers mots de l'ouvrage. Sa morale, en quelque sorte. La propre définition, finalement, de cette piteuse « médiologie ». Et je ne sais pas si vous êtes comme moi. Mais cette idée d'« un seul corps boudiné » pour des « millions d'oreilles », cette façon de vouloir à tout prix « manger à plusieurs » et, par conséquent, chacun digérant pour l'autre, cette manie de vouloir collectiviser à tout prix ce que nous avons de plus irréductiblement intime, me fait un peu froid dans le dos.

C'était : Bernard-Henri Lévy, dans : Le bloc-notes de Bernard-Henri Lévy

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